Au nom d’Allah le Très Miséricordieux, le Tout Miséricordieux
Ibn Taïmiya et le djihad défensif
(Partie 1)
D’après l’article : taqyîd el fahm wa e-dhabt li kalâm Sheïkh el Islam anna el djihâd e-daf’ lâ yashtaritu lahu shart de ‘Imâd Târiq.
Louange à Allah le Seigneur de l’Univers ! Des louanges à la fois pures, bénites et comme Il les aime et agrée ! J’atteste qu’il n’y a d’autre dieu digne d’être adoré en dehors d’Allah, Seul et sans associé ! Il détient les nobles Noms ! Et j’atteste que Muhammad, est Son serviteur, Son Messager, et le Prophète élu ! Que les Prières d’Allah et Ses plus amples Salutations soient sur lui, ainsi que sur ses proches, ses Compagnons, tous ceux qui se contentent de sa tradition et qui suivent sa voie !
Avant-propos :
‘Abd Allah le fils de l’Imâm Ahmed témoigne : « J’ai demandé à mon père : et s’ils venaient à partir en guerre sans l’autorisation de l’Imâm ?
- Non, répondit-il, pas sans son autorisation, sauf dans la situation où l’ennemi les attaque par surprise, et qu’ils n’aient pas le temps de le prévenir ; je pense que, devant le fait accompli, ils n’ont rien d’autre à faire que de défendre les musulmans. »[1]
On trouve dans Mukhtazar el Khiraqî, qui est le premier résumé de fiqh de l’école hanbalite : « Il incombe à tout le monde, à la venue de l’ennemi, de se mettre sur le pied de guerre – qu’ils soient en petit ou en grand nombre – ; mais personne ne doit prendre la charge sans l’autorisation de l’Imâm, sauf dans la situation où l’ennemi, en surnombre, les attaque par surprise, et, de peur que le temps qu’ils le préviennent, les hostilités soient déjà engagées. »[2]
El Muwaffaq ibn Qudâma, qui est le plus célèbre de ses commentateurs, donne plus de détails : « Ils ne doivent pas partir en guerre sans l’autorisation de l’Imâm, sauf dans la situation où ils ne sont pas en mesure de le prévenir quand l’ennemi les attaque par surprise ; dans ce cas, ils peuvent se passer de son autorisation pour éviter la catastrophe. »[3]
e-Zarkashî, un autre de ses commentateurs, y va de son explication : « Ils n’ont pas le droit de partir en guerre sans l’autorisation de l’Imâm, étant donné qu’une telle décision relève de ses seules compétences. Il est mieux informé des déplacements, de tactiques et du nombre de l’ennemi. Son opinion fait donc autorité, sauf dans la situation où il n’est pas possible de le prévenir, comme, par exemple, quand un ennemi en surnombre les attaque par surprise, et que, faute de temps, ils sont amenés à le repousser dans l’immédiat. Dans ce cas, l’autorisation n’a plus lieu d’être, car c’est un moindre mal. »[4]
La guerre défensive (qitâl daf’) est la plus haute forme d’autodéfense (daf’ sâil)
Sheïkh el Islam ibn Taïmiya a dit : « Quant à la guerre défensive, celle-ci incarne la plus haute forme d’autodéfense en vue de protéger l’honneur et la religion. Elle est donc obligatoire à l’unanimité des savants, étant donné que l’ennemi porte atteinte à la vie matérielle et spirituelle des musulmans ; après la foi, rien n’est plus important que de repousser son agression, et cela sans condition, mais uniquement avec les moyens du bord. Les savants de notre école notamment mettent explicitement ce point en avant. »[5]
et cela, sans condition
qu’entend notre Sheïkh damascène par « sans condition ». D’autres passages de ses ouvrages nous apprennent qu’il distingue entre un terme dans son acception absolu et un terme dans l’absolu.[6] Ibn el Qaïyim a un discours de ce genre.[7] Il incombe donc de distinguer entre la condition absolue et la condition dans l’absolu. En voici la démonstration.
Démonstration :
1- L’individu est responsable dans les limites de ses capacités
L’auteur du passage précédent est le même auteur des paroles : « Une étude exhaustive des textes du Coran et de la sunnanous montre que la responsabilité d’un tiers est conditionnée à la capacité de connaitre et d’agir. En étant incapable de fournir l’un de ses deux éléments, il n’en est plus responsable, car : [Allah n’impose rien à la personne qui soit au-dessus de ses capacités].[8] »[9]Ailleurs, il renchérit : « Quand Allah ordonne de Lui obéir et de Le craindre, c’est uniquement dans la mesure du possible, conformément au Verset : [Craignez Allah dans la mesure du possible].[10] Un hadîth nous apprend également : « … et ce que je vous ordonne, faites-le dans la mesure du possible. »[11] »[12]
Ainsi, ce principe est conforme à la tendance des anciens, et à la majorité des savants. Allah n’impose rien qui soit au dessus de nos forces, et les obligations sont restreintes à la capacité de les faire. La punition prévaut uniquement quand on délaisse volontairement une obligation ou en enfreignant une interdiction, et cela, bien sûr, après avoir établi la preuve céleste contre un fautif éventuel.[13]
En outre, quand le Législateur enjoint de combattre toute faction rebelle, c’est uniquement dans la mesure du possible, car ils ne sont pas pires que les païens et les infidèles. L’histoire prophétique nous montre qu’il vaut mieux dans certaines situations se concilier l’ennemi en nouant des accords de paix et en lui offrant des largesses. Un Imâm peut s’imaginer à tort avoir la force pour lui tenir tête. Dans ce cas, l’intérêt réclame de renoncer à ce projet.[14]
2- La règle du moindre mal
Selon le grand principe de l’Islam, il incombe, d’une part de s’accaparer le bien et de la parfaire, et, d’autre part, de parer au mal et de le minimiser. Or, si le bien et le mal viennent à s’encombrer ou à s’opposer, il faut s’en tenir à l’avantage prépondérant et opter pour le moindre mal.[15] Ainsi, dans la mesure où renoncer aux hostilités engendre un plus grand mal pour la religion, il incombe sous cet angle également de les combattre en vue de repousser le plus grand mal et de sauvegarder le moindre mal. Nous devons donc tenir compte de ce grand principe immuable.[16] Dans le cas où il n’y a pas d’autre solution pour éviter un grand mal que de supporter un mal moins grave, il devient tout à fait légitime de l’adopter.[17] Sheïkh Taqî e-Dîn alla jusqu’à approuver la réaction de certains initiés ayant renoncé à participer à la défense de Damas, convoitée dès lors par les Tatars. La raison, c’est que cette fois-ci, la guerre n’ayant aucun caractère légitime, allait rapporter de grands inconvénients et de sombres lendemains.[18]
À suivre…
[1]Masâil ‘Abd Allah li abîhi(2/258).
[2]Mukhtazar el Khiraqî(p. 138).
[3]El Mughnî(3/383).
[4]sharh mukhtazar el Khiraqî(6/450).
[5]El fatâwâ el kubrâ(4/608).
[6]Majmû’ el fatâwâ(2/164).
[7]Badâi’ el fawâid(4/821).
[8]La vache ; 286
[9]Majmû’ el fatâwâ (2/164).
[10]E-taghâbun ; 16
[11]Rapporté par el Bukhârî (7288), et Muslim (1327), selon Abû Huraïra (t).
[12]Majmû’ el fatâwâ (31/92).
[13]Majmû’ el fatâwâ (19/227).
[14]Majmû’ el fatâwâ (4/442).
[15]Majmû’ el fatâwâ (28/284).
[16]Majmû’ el fatâwâ (28/506).
[17]Majmû’ el fatâwâ (31/92).
[18]E-radd ‘alâ el Bakrî(2/733).
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